Mais c’est quoi la masse salariale ?

Dans cet épisode, nous allons parler de la masse salariale et des conséquences budgétaires de son augmentation.

« Qui veut gagner de l’argent en masse ? » disait Gad Elmaleh dans un de ses sketchs. C’est ça non la masse salariale ? Du pognon en masse que t’amasse ?

« C’est ton ultime bafouille » Fantômas ? Tu veux faire de la RH et la masse salariale ça ne te parle pas plus que ça ? J’en suis fumasse.

Il y a de quoi faire la grimace, tu as raison ! La masse salariale c’est une question de poids… qu’on ne peut pas éluder. Dans certains secteurs d’activité, comme les services, cela peut représenter 80% de tes coûts. C’est te dire.

Donc on s’y intéresse quand on fait de la RH. Et même quand on n’en fait pas ! Alors, la masse salariale, c’est quoi l’histoire ?

On commence par un peu de physique ? La masse, le poids tout ça tu te rappelles ? La masse c’est la quantité de matière d’un truc. Tu mesures ça avec des grammes, des kilogrammes etc.

Ah oui je me souviens, 1 kilo de plume, 1 kilo de plomb. Et le poids c’est la force avec laquelle un astre, comme la Terre, attire l’objet vers lui. Les Newtons. Donc le poids dépend de la masse et de l’attraction. Mais c’est quoi le rapport ?

Ne pas confondre la masse et le poids. La masse salariale, c’est la quantité de salaires. Et la même quantité ne pèse pas de la même manière partout. Commençons donc par définir ce qu’est cette quantité, la masse salariale.

L’Insee définit la masse salariale comme « le cumul des rémunérations brutes des salariés » donc c’est bien un volume. On va faire court et simple. Janvier tu as gagné 10. Février tu as gagné 10. Mars tu as gagné 10.

Hop hop hop tu ne vas pas me faire tous les mois où j’ai gagné 10 jusqu’à la fin de l’année pour m’expliquer que la masse salariale, du coup puisqu’on parle de coûts, c’est 120. 12×10.

On a compris en effet. Le cumul des rémunérations brutes sur l’année. Cela pourrait évidemment poser plein de questions pour être précis. On en prend quelques-unes pour illustrer.

La masse salariale brute inclut tous les éléments de salaires de la rémunération globale soumis à charges sociales, dont y compris les primes, mais pas les charges patronales. Donc on pourrait se dire que les deux, avec ou sans les charges patronales, sont deux indicateurs intéressants.

La masse salariale brute non chargée ou chargée. L’un te parle au fond des salaires, l’autre se rapproche plus du coût de la main d’œuvre.

On peut aussi se poser la question de qui cela couvre : à effectif constant ou pas, les salariés en CDI seulement ou avec les CDD, les stagiaires ? Que fais-tu de l’intérim qui n’est de fait pas dedans mais parle aussi de ton coût de main d’œuvre.

On peut aussi avoir l’œil budgétaire, pour projeter son évolution à venir. Bref, ce qui nous importe ici, ce n’est pas le détail de ce qu’il y a dedans mais bien l’esprit.

Or, l’esprit en l’occurrence ce sont deux choses.

  1. La masse salariale, c’est une quantité, une masse donc, en l’occurrence celle des salaires sur l’année
  2. Ce que tu mets dedans précisément dépend de l’angle d’analyse que tu veux avoir.

Maintenant qu’on comprend ce que c’est, on va s’intéresser plus en détail à la perspective budgétaire, un exercice classique en RH.

On a donc en 1. La masse. Et en 2. Son évolution, dont on aimerait anticiper les conséquences budgétaires. Et c’est là où on parle de niveau, masse et report. On explique.

On disait tout à l’heure que tous les mois de l’année N, tu as gagné 10. Donc la masse salariale de l’année N, c’est 12 fois 10 donc 120. Or, comme je suis très généreux, à la fin de l’année je te file 10% d’augmentation pour l’année prochaine donc l’année N+1. Il se passe quoi ?

… Tous les DRH qui nous écoutent râlent en pensant à leur future NAO en disant que 10% ça ne va pas bien la tête non ? Sinon, il se passe deux choses : 1. Le niveau de rémunération a augmenté de 10%. Et 2. La masse salariale de l’année N+1 a augmenté de 10% par rapport à celle de l’année N.

Bien vu chef.

  • D’un côté 10×12 donc 120 pour l’année N et
  • 10 majoré de 10% soit 11 fois 12 pour l’année N+1 donc 132.
  • 132 comparé à 120 c’est bien 10% d’augmentation en masse.
  • CQFD.

On vient là de distinguer deux natures d’augmentation à suivre.

L’augmentation en niveau et l’augmentation en masse.

  • D’un côté, de combien le niveau augmente d’un mois à l’autre
  • et de l’autre de combien la masse sur l’année a augmenté.

Imagine maintenant que la décision d’augmenter ton salaire fixe de 10% ait eu lieu au mois de juin de l’année N. Il se passait quoi ?

L’augmentation en niveau est toujours de 10% puisque le niveau de la rémunération de juillet est monté de 10% par rapport à celui de juin. Il est passé de 10 à 11. Mais pour le coup l’augmentation en masse sur l’année N ne sera pas la même. Pour une raison simple.

Cette augmentation en niveau de 10% en juin de l’année N a deux conséquences :

  1. Une conséquence sur la masse salariale de l’année N pour 6 mois
  2. Pour 12 mois sur l’année N+1.
  3. C’est ce qu’on appelle l’effet report.

Les conséquences de ta décision se reportent sur l’année suivante aussi.

En l’occurrence, ma décision d’augmentation de 10 à 11 en juin de l’année N a bien 3 conséquences :

  1. Une augmentation en niveau de 10% (11 comparé à 10)
  2. Une augmentation en masse sur l’année N par rapport à N-1 en l’occurrence 5% (c’est-à-dire 6×10 (60) + 6×11 (66) égale 126 comparé à 120 soit 5%)
  3. Un effet report de l’année N sur l’année N+1 qui sera de 12 fois 11 en année N+1 soit 132 comparé à 126 donc 4,76%.

La décision d’augmentation en niveau de 10% en juin de l’année N a donc pour conséquence une augmentation en masse de 5% sur l’année N et un effet report de N à N+1 de 4,76%.

3 effets en effet : le niveau, la masse et le report. Et évidemment les 3 sont liés. De manière simple d’ailleurs, si tu veux la formule : l’effet report est égal à l’effet niveau divisé par l’effet masse.

En l’occurrence dans notre exemple l’effet report c’est l’effet niveau 10% (donc 110) divisé par l’effet masse 5% (donc 105) soit 104,76 on a bien un effet report de 4,76%.

Et si tu m’avais donné une prime en juin plutôt qu’une augmentation de 10% de mon salaire fixe ?

Cela aurait eu pour conséquence une augmentation en masse mais pas d’effet de report sur l’année suivante. En gros du one shot qui n’alourdit pas la barque. Comme quoi quand on prend une décision, autant réfléchir avant aux conséquences.

Évidemment, tout cela c’est à effectif constant. Ce qui sera intéressant aussi c’est de comprendre les autres formes d’évolution de ta masse salariale au global : plus de gens, des gens plus ou moins qualifié, etc.

Là on parlera alors d’effectif, de Noria, de GVT etc. mais c’est un autre sujet.

En résumé, la masse salariale c’est le cumul des salaires bruts sur une année. Les décisions de les augmenter en niveau à un moment donné ont des conséquences sur l’année en cours selon leur date d’effet, c’est l’effet masse, et sur l’année qui suit, c’est l’effet report. Les trois – effets niveau, masse et report – étant bien sûr mathématiquement liés.

J’ai bon chef ?

Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire.