Le comité transverse des rémunérations

Dans cet épisode nous allons évoquer le comité transverse des rémunérations et nous demander à quoi ça sert.

L’éternelle, et épineuse, question des rémunérations, sujet de toutes les polémiques et des passions en tout genre, quand ce n’est pas tabou.

On focalise sur les montants bien sûr. Chacun estimant qu’il mériterait plus, jalousant parfois le salaire des autres. Parce qu’en la matière, les écarts, les gens ne les aiment pas !

« Le pire écart de salaire, c’est un mois entre deux paies » disait Jean-Marie Gourio dans ses « brèves de comptoir ». Dieu sait à quel point le pognon en abreuve des brèves dans tous les comptoirs de France et de Navarre.

Bref, un besoin d’équité, ou plus exactement le sentiment que c’est équitable. Pour ce faire l’entreprise met en place différents dispositifs. Alors, le comité transverse des rémunérations, c’est quoi l’histoire ?

On ne parle pas ici du comité des rémunérations qui veille à ce qu’un conseil d’administration soit en situation de prendre des décisions appropriées en matière de rémunération des mandataires sociaux. C’est un autre sujet.

En revanche, nous parlons des comités transverses, qui, en l’occurrence sont des outils de gestion que certaines entreprises mettent en place pour veiller à l’équité transverse en matière de rémunération des salariés.

On comprend l’intention. L’équité interne des rémunérations est un des deux piliers essentiels d’une politique de rémunération, avec la compétitivité externe. Elle répond à un besoin fort des salariés, celui de justice.

Le plus généralement, les entreprises utilisent une méthode d’évaluation de poste, comme la méthode Hay, pour apprécier le poids des responsabilités de chacun d’entre eux. En substance, leur contribution à la chaîne de valeur.

Elles ont ensuite le plus souvent une classification, qui permet de déterminer des niveaux de rémunération cibles en fonction de ces évaluations. Ce sont les outils principaux qui lui permettent d’assurer une certaine équité selon les responsabilités des postes.

L’une des difficultés, notamment dans une entreprise de taille importante, surtout lorsqu’il s’agit d’un groupe constitué de filiales avec des business lines différents, c’est de s’assurer que cela marche globalement pour tous.

Dit autrement, s’assurer que d’un endroit à l’autre, d’un métier à l’autre, d’une filiale à l’autre, les rémunérations sont équitables. Tant en termes de niveaux bien sûr, c’est ce à quoi les gens accordent de l’importance, que d’égalité dans l’application des principes politiques.

C’est d’autant plus important si l’on veut privilégier la mobilité interne, les passerelles inter-métiers etc.

C’est ce à quoi s’attèle un comité transverse des rémunérations. Au fond, sa mission est simple à exprimer. Veiller à l’équité entre les différents départements, services, métiers, établissements, filiales etc. pour ajouter une dimension transverse aux processus de rémunération souvent verticaux.

Ce qui est normal puisqu’ils sont en lien avec des processus budgétaires. Mais ces processus sont aussi cloisonnant par nature, d’où la nécessité d’un regard plus global, d’une vision plus holistique du sujet.

Les méthodes d’évaluation y sont utiles là aussi car elles sont supposées permettre une comparaison entre postes indépendamment des métiers, des localisations etc. Mais cela ne suffit pas à rendre l’exercice facile.

On connaît le triste jeu qui se déroule parfois dans certains comités de mobilité par exemple. Quand le sport consiste à refiler ses boulets aux autres en vantant leur potentiel et à piquer les meilleurs chez les petits copains.

Les joies de la nature humaine. Heureusement, ce n’est pas toujours le cas. Mais le comité transverse des rémunérations n’y échappe pas plus que tout autre.

On peut y voir un théâtre, où se déroule une pièce classique, celle des jeux de pouvoir, celles des couvertures qu’on tire à soi, espérant quelques deniers de plus pour ses troupes – pour être tranquille – sans toujours placer l’intérêt du bien commun, celui de l’entreprise, au-dessus du sien.

Rien de moins étonnant me direz-vous mais c’est précisément ce à quoi sert un comité transverse. Dépasser les guerres de clochers et la jouer collectif.

C’est pour cela qu’il faut une fonction RH robuste, capable de faire contrepoids aux appétits aiguisés des opérationnels. Et cela suppose 3 choses selon nous.

D’abord, une politique de rémunération formalisée, claire, communiquée et explicitée. Après tout chaque manager doit non seulement la mettre en œuvre mais en être l’ambassadeur en en faisant la pédagogie.

Ensuite, une véritable connaissance de la chaîne de valeur, des métiers et de leurs problématiques opérationnelles. La crédibilité et la pertinence de la fonction en dépendent. D’où l’imperfection de l’expression fonction support, mais c’est un autre sujet.

Enfin, oublier les incantations et les opinions pour formuler un discours de preuves fondé sur des données fiables et leur analyse pertinente. Ce qui demande de développer une culture d’analyse des données.

En résumé, le comité transverse des rémunérations sert à veiller à l’équité transverse des rémunérations. Or, compte-tenu des inévitables jeux de pouvoir, il faut une vraie politique de rémunération ainsi qu’une fonction RH qui connaît les métiers et les enjeux business et qui développe un discours fondé sur les données et leur analyse.

J’ai bon chef ?

Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire.