Productivité individuelle et productivité collective

Dans cet épisode nous allons parler de productivité, sous les angles individuel et collectif

On ne va pas y aller par quatre chemins, avec l’intelligence artificielle tu vas voir ce que tu vas voir, on va faire des gains de productivité considérables. Précipite donc toi petite vache à lait pour acheter ma dernière « app » qui intègre de l’IA générative.

Et voilà, le tour est joué, comme tu le dis : ce n’est pas la peine de couper les poils de cul en 4 ni les poires en deux, le digital serait la solution miracle à la productivité…

Sauf qu’à ne rien couper, ni en deux, en trois ou en quatre, on fait des amalgames, sources de promesses parfois superfétatoires. Alors, productivité individuelle et productivité collective, c’est quoi l’histoire ?

Les mensonges qu’on croit volontiers reposent souvent sur une logique simple : on part d’une observation facilement constatable, on fait un énorme raccourci intellectuel en s’appuyant sur un préjugé de ses interlocuteurs, une croyance bien ancrée, et hop on arrive à une conclusion fallacieuse…

Genre un étranger à volé une pomme à côté de chez toi et tous les étrangers sont des voleurs. Ah on n’est pas sorti des ronces avec ce genre de conneries abyssales. Et sur le sujet qui nous intéresse ici, c’est un peu la même chose.

L’informatique offre bien sûr des gains de productivité personnelle considérable pour celles et ceux qui savent s’en servir intelligemment. C’est assez facilement observable dans la pratique et chacun en fait même l’expérience personnelle dès lors qu’il maîtrise bien un outil.

On a là peut-être un premier biais d’ailleurs mais ce n’est pas celui-ci qui nous intéresse le plus ici. Il ne faudrait pas croire qu’il suffit de mettre un outil informatique, y compris puissant et convivial, dans les mains de quelqu’un pour que sa productivité personnelle augmente.

En effet, on l’a dit : savoir s’en servir intelligemment. Et l’outil puissant dans les mains de celui ou celle qui ne sait pas bien s’en servir peut produire l’effet inverse justement parce qu’il est puissant.

Mais admettons-le comme postulat : une informatique personnelle bien maîtrisée améliore la productivité personnelle. Tu sais faire des tableaux croisés dynamiques sur Excel, tu vas plus vite. Tu sais bien utiliser la gestion des références dans Word tu te facilites la bibliographie de ton bouquin ou de ton mémoire de fin d’étude.

Donc, bien sûr, tu comprends et te sers avec intelligence de ChatGPT ou de tout autre outil d’intelligence artificielle, générative par exemple, tu peux très significativement booster ta productivité personnelle.

Tu prends du code informatique par exemple, avec ChatGPT c’est comme si tu avais un stagiaire qui te décharge d’une partie du travail et en plus qui te fait la pédagogie de ce qu’il fait. Tu gagnes du temps et tu progresses.

Tu retouches des photos ou tu en cherches sur des banques d’image libres de droits pour illustrer ton article et hop l’IA générative, là encore, bien comprise et bien utilisée, te fait gagner un temps fou.

Et il en va donc de même des outils collaboratifs en interne dans les entreprises comme des programmes experts qu’on met à la disposition des gens qui travaillent.

S’ils sont bien pensés, et c’est-là aussi un autre biais, ils ne le sont pas toujours bien en fonction de la réalité des exigences métiers, mais s’ils sont bien pensés et bien utilisés, normalement chaque opérateur améliorer sa productivité.

Le gestionnaire de paie par exemple pour lequel tu mets à disposition des routines et des indicateurs pour mieux automatiser ses contrôles de paie, gagne du temps. Pareil dans tous les métiers.

Donc en premier résumé, l’outil bien pensé et bien utilisé par un opérateur est une source de productivité individuelle pour cet opérateur. On sait qu’ils ne sont pas toujours bien pensés, loin s’en faut d’ailleurs, ni bien utilisés, mais admettons ce premier argument.

Il en va de même pour toute autre forme de démarche, processus, procédure, outil, automatisation destinée à faciliter le travail de ceux qui travaillent : bien pensée et bien utilisée, c’est alors une source de productivité individuelle.

Mais le seul problème c’est que les gens ne travaillent pas seuls. La plupart du temps, il s’agit pour chacun de contribuer à un processus plus vaste, d’être un maillon dans un dispositif ou tout simplement de collaborer avec d’autres.

Et c’est là où la somme des productivités individuelles ne fait pas automatiquement ni systématiquement la productivité collective. Ce n’est pas très difficile à comprendre et se figurer.

Si chacun court plus vite mais que personne ne court dans le bon sens, la productivité collective peut même s’effondrer. Combien de fois le voit-on dans des projets cacophoniques où on a l’impression que chacun est au taquet et que l’ensemble ne tourne pas rond ?

Chacun souffle fort dans son tuyau d’orgue et personne ne joue la même partition. Le résultat des courses, ce n’est plus de la musique mais du bruit. Toute la difficulté d’orchestrer un gain individuel pour que ce dernier serve le collectif.

En deux mots : organisation et management et c’est vieux comme la nuit des temps. Mais quand on veut vendre l’outil qui favorise la productivité individuelle autant ne pas être trop rigoureux sur les mots…

Comme ça tout le monde y croit. Oubliant les coûts de transaction et d’échanges en interne, les atermoiements des uns, les jeux de pouvoir des autres, les mauvaises volontés, bref, ce qui fait la vie d’une entreprise.

Or, comme la productivité collective c’est bien la quantité de ressources consommées rapportée à ce que tu as créé, elle dépend de très nombreux autres facteurs qui ne dépendent pas seulement de l’efficacité de chacun mais de l’efficience du tout.

En résumé, ce qui contribue à améliorer la productivité individuelle n’est en rien une garantie d’amélioration de la productivité collective car cette dernière n’est absolument pas la somme des productivités individuelles mais bien la productivité de l’ensemble, soumise à bien d’autres facteurs.

J’ai bon chef ?

Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire