Soft, mad skills et pénurie de main d’œuvre

Dans cet épisode nous allons nous interroger sur la question des soft skills et des mad skills dans un contexte de pénurie de main d’œuvre.

Dans cet épisode nous allons nous interroger sur la question des soft skills et des mad skills dans un contexte de pénurie de main d’œuvre.

Ah les fameuses soft skills – et encore mieux les mad skills – tout droit venues des Etats-Unis, devenues si importantes dans le recrutement ou la gestion des carrières…

On peut se demander s’il y a 20 ou 30 ans, au temps des dinosaures lorsque nous recrutions avec une massue sur l’épaule au détour d’une grotte, nous n’accordions pas d’importance aux compétences comportementales et aux spécificités personnelles, mais c’est un autre sujet.

C’est tellement évident. Nous voulons l’oiseau rare qui maîtrise toutes les compétences techniques du job, qui les met en œuvre avec intelligence grâce à des compétences comportementales dont il est bardé et en plus, cerise sur le gâteau, s’il a escaladé l’Everest sans masque à oxygène avec un vélo sans roulette c’est encore mieux.

Quoi de plus légitime en effet que de rechercher l’être idéal et parfait, quand on le peut ? Alors vive les compétences comportementales et les personnalités hors normes. Mais… Soft skills, mad skills et pénurie de main d’œuvre, est-ce que ça marche bien ensemble ? C’est quoi l’histoire ?

Les images animalières sont rigolotes je trouve. On cherche l’oiseau rare ou le mouton à cinq pattes. Aucun commentaire sur ce choix bestial et la symbolique dont il pourrait être porteur chez des esprits… moqueurs.

C’est ringard, le mouton à cinq pattes. C’est trop 1.0 moi je fais du recrutement 3.0 je cherche le mouton à 7 pattes. Celui qui maîtrise le job c’est 1.0. Des soft skills en plus c’est du 2.0 et moi et moi et moi je suis le mad max du recrutement. Je vise la mad skill 3.0.

Bon arrête tes blagues à deux balles… les moutons, on leur tond la laine ou ça finit en côtelettes… No comment sur les choix animaliers. Et dois-je te rappeler que les oiseaux rares sont faits pour s’envoler. Ou alors tu les mets en cage, et ils s’éteignent.

En effet, trêve de plaisanterie, tu as raison, et revenons à nos moutons. C’est bien gentil d’accorder une grande importance aux soft skills et aux mad skills . Au-delà du fait qu’on a une fois de plus l’impression qu’on réinvente l’eau tiède, cela mérite qu’on se pose deux questions de contexte.

Ne doutons pas un instant que ces soft ou mad skills s’ajoutent… aux hard skills. Pardon aux compétences métiers ou techniques nécessaires à l’exercice de ton job. C’est la première question de contexte. Un pilote d’avion qui a le sens du client et le sourire, dont l’attitude personnelle de calme et de sagesse rassure l’équipage comme les voyageurs, c’est top évidemment.

Mais s’il ne plante pas l’avion, c’est bien aussi. Allez, on connaît l’expression du consultant aux tempes grises qui soudainement serait plus crédible que celui qui débute. Dont acte. Mais ça commence par les compétences de ton job. Nécessaire, peut-être pas suffisant cela ne fait aucun doute, mais certainement nécessaire.

Le second élément de contexte, c’est le marché. Tu cherches quelqu’un pour un job de  boucher dans la grande distribution par exemple. Tu n’en trouves pas. Tu cherches un ou une serveuse pour un restau. Tu n’en trouves pas. Tu cherches un ou une cariste en usine. Tu n’en trouves pas.

Alors autant te dire qu’avant de te résigner à réduire la voilure de ton activité tu vas bien être obligé de baisser tes ambitions. Alors le boucher orienté client bah tu vas déjà te contenter de celle ou celui qui sait découper et servir la viande. Et s’il ou elle ne sait pas t’expliquer la différence entre la poire, l’araignée et le merlan bah tant pis.

Tu n’es plus au rayon boucherie là mais aux fruits et légumes ou la marée non ? … Ah non tu as raison c’est bien des parties du bœuf.

Bref, en période de forte pénurie de main d’œuvre, trouver des personnes qui maîtrisent correctement les compétences de leur métier, c’est déjà une gageure…

Alors tu peux toujours faire la fine bouche en rêvant du cariste qui a une vision d’ensemble et pose les plaques de plâtre pour optimiser leur chargement… avec le sourire et en favorisant un esprit d’équipe dans l’usine, mais ce n’est pas gagné.

On manque de profs et c’est la rentrée ? On a besoin de consultants en cata pour un projet client ? Qu’à cela ne tienne, on pare au plus pressé, on forme aux basiques du métier au lance-pierre et on envoie au casse-pipe. En gros on gère déjà mal la problématique des hard skills, alors le sens de la pédagogie, l’esprit critique et le sens du client… On verra plus tard.

En d’autres termes, ce à quoi on accorde de l’importance, en la matière comme en d’autres, dépend évidemment du contexte et des contraintes qu’il fait peser sur nos choix et sur ce qui est possible. Ces contraintes pèsent parfois très lourd.

Tu peux aussi faire d’autres choix, comme ne pas infléchir tes critères quitte à amputer ta croissance ou tes marges au nom d’une approche plus durable et raisonnable de ton activité. Mais c’est un autre sujet.

Ou alors tu acceptes les temps longs et tu cherches des gens qui ont toutes les compétences sauf celles du métier et tu prends le temps de les former. Cela ne pare pas au plus pressé mais tu construis du solide durable, s’ils ne se barrent pas au plus offrant une fois que tu les as formés.

En résumé, accorder de l’importance aux soft skills ou mad skills a évidemment du sens mais peut aussi se heurter à la dure réalité du marché de l’emploi dont les contraintes peuvent imposer d’être moins regardant ou à tout le moins plus nuancé dans ses ambitions.

J’ai bon chef ?

Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire.