La fonction RH gentille animatrice
Dans cet épisode nous allons parler de certaines pratiques RH qui ne sont pas à la hauteur des enjeux qu’elles prétendent aborder.
La fonction RH est une fonction qu’on affuble parfois de tous les maux, la jugeant trop ceci ou pas assez cela, ou qu’on veut cantonner à un rôle administratif, certes nécessaire mais très loin d’être suffisant.
Sans parler du traditionnel RH bashing qui heurte les praticiens du métier qui font de leur mieux, souvent dans l’ombre, malgré les multiples contraintes qui jalonnent leur activité. Une fonction RH à qui l’on reprocherait presque de ne pas avoir résolu tous les mystères de l’humain…
… Qu’on n’a pourtant pas résolus depuis des lustres. Mais qu’à cela ne tienne, à la fin, ce sera bien toujours de la faute de la RH.
Mais il faut aussi avouer que certains praticiens du métier ne sont pas toujours là où ils devraient et donnent parfois le bâton pour se faire battre. Alors, la fonction RH gentille animatrice, c’est quoi l’histoire ?
En vrai, on n’a rien contre les gentilles animations façon club de vacances. Donc on n’a rien contre les gentils animateurs ou gentilles animatrices. Mais ça va bien en vacances, avec des gens qui ont choisi de venir profiter de ces gentilles animations.
Quand il s’agit de la fonction RH et des sujets importants, c’est une autre histoire ! Je repense à cette personne qui occupait le poste de RH dans une start up, son interview était lunaire… En substance, ça donnait ça :
… « Moi, je m’occupe du bonheur des gens. Mon job, c’est de mettre du baume dans les cœurs, j’organise des événements, je prends soin d’eux. Je suis un peu leur maman… »
Bref on arrête-là les niaiseries, ce n’est pas la peine d’en dire bien plus, tout le monde aura compris ce que l’on vise ici.
Dans la fonction RH comme dans d’autres fonctions, certains réduisent l’exercice du métier non seulement à son expression la plus simpliste mais aussi déconnectée du réel des sujets à traiter.
Exercer un métier RH ce n’est pas amuser la galerie avec des événements internes. En l’espèce d’ailleurs, ce qui se joue, ce n’est pas tant la crédibilité de la fonction – après tout on récolte ce que l’on sème – mais les dégâts qui peuvent en résulter.
Les bonnes intentions – dont on ne doute pas au demeurant – ne peuvent pas se limiter à traiter en surface des sujets graves ou à les réduire à une animation de tête de gondole. L’enjeu ce n’est pas d’amuser la galerie mais bien de tenter d’apporter des réponses crédibles.
Comment pourrait-on croire un instant qu’un sujet comme celui de la diversité, par exemple, pourrait se satisfaire d’un drapeau arc-en-ciel qu’on accroche à l’entrée de l’entreprise un jour qu’on a décrété « la journée de l’inclusion » ?
Comme s’il suffisait d’arborer un symbole pour que l’essentiel soit fait… « A la foire à tout, rendez-vous au stand inclusion, il y a des animations trop sympas ».
Pourquoi ne pas offrir une rose le jour de la fête des femmes ou mieux encore un aspirateur pendant qu’on y est ?
La journée internationale de lutte pour les droits des femmes c’est une bonne occasion de faire quelque chose en plus, pourquoi pas, sensibiliser c’est utile et nécessaire. Mais à aucun moment cela n’exonère du fond.
Et alors on ne parle même pas de ces entreprises qui demandent à des femmes de venir faire des conférences sur les droits des femmes ce jour-là, le tout… pour pas un rond parce qu’on n’a pas de budget ! Allez, jouons sur la cause, c’est plus facile.
La plupart des sujets qui relèvent de la responsabilité de la fonction ne peut se limiter à des animations de foire, si bien intentionnées soient-elles ! On ne conteste pas ici le côté bénéfique d’actions de sensibilisation bien sûr, ou d’événements destinés à des prises de conscience ou une forme d’acculturation.
Ce que l’on questionne ce sont ceux qui se limitent à ça. Non seulement en réduisant un sujet grave à cette seule dimension mais, qui plus est, et c’est là le problème, convaincus d’avoir bien fait leur travail.
Ou résignés peut-être, se disant au fond que c’est le terrain de jeu auquel on veut les cantonner, précisément pour ne pas aborder les vrais sujets. Pas dupes, certes. Mais résignés.
Le sujet du climat, comme celui de la QVCT par exemple, cela ne se limite pas à l’animation de la semaine du même nom ! Même si des manifestations de ce type pour sensibiliser c’est utile, l’essentiel n’est en effet pas là.
On ne peut pas se contenter de cela, ou alors, cela témoigne d’une compréhension un peu légère des enjeux de la qualité de vie et des conditions de travail.
Le climat ? C’est juste une fresque ? « Hey les gars c’est cool la RSE on va mettre des pailles en métal à la cafet’ ». Et hop ! Deux ou trois affiches et le tour est joué.
Surtout que parfois la bonne intention se noie dans les mauvais détails quand on se focalise sur des sensibilisations qui ne sont pas les plus importantes. Sensibiliser autour de soi, cela peut avoir un réel impact quand il s’agit de faire évoluer des schémas mentaux ou des habitudes.
Raison de plus pour choisir les bonnes cibles et les bons thèmes. Mais tant qu’on ne témoigne pas aussi des engagements de l’entreprise, on a fait quoi en vrai ? Demander aux salariés de faire un effort qu’elle, elle ne fait pas ?
Sensibilisons c’est utile ; créons des temps conviviaux pour favoriser un meilleur vivre ensemble, cela ne fait pas de mal. Mais c’est un premier temps de la valse qui risque bien d’en avoir qu’un si on s’arrête là.
On le sait, ce n’est pas toujours si facile d’aborder certains sujets dans certaines entreprises. Mais si l’on veut vraiment s’y attaquer, il faut s’attaquer au fond et ce qu’il exige. Et c’est évidemment plus que de l’animation.
La question qui se pose alors est celle du risque que l’on prend à les porter un peu plus fort que ce que la culture ambiante est prête à entendre.
La question se pose non seulement au regard des enjeux en tant que tels mais également aux yeux du corps social, de moins en moins dupes face au washing et autres mascarades qui pourraient en tenter quelques-uns.
La grande majorité des professionnels RH fait du mieux qu’elle peut, là où ils sont, en fonction des contraintes. Mais on doit aussi dire qu’on peut attendre d’eux de faire bouger les lignes.
En résumé, aborder des sujets comme la RSE, la QVCT ou la diversité avec des actions de surface, comme de seules animations ou événements internes, c’est peut-être utile mais c’est très loin de suffire car elles demandent des actions de fond, le plus souvent durables.
J’ai bon chef ?
Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire.