Expérience client et digital, une affaire de culture

Dans cet épisode nous allons parler d’expérience client et de digital, en nous intéressant à la dimension culturelle que cela suppose.

Dans cet épisode nous allons parler d’expérience client et de digital, en nous intéressant à la dimension culturelle que cela suppose.

Ah moi mes clients, je les connais ! Je suis proche d’eux, alors autant te dire que je sais tout d’eux. La proximité ? C’est la clé pour connaître tes clients, je l’ai toujours dit. Alors ce n’est pas ton digital qui va me faire peur.

La proximité c’est la clé pour tout savoir d’eux ?… Je veux bien mais pense à ces vieux couples qui vivent l’un à côté de l’autre depuis des lustres et qui ne savent plus rien l’un de l’autre tant ils ne se parlent plus ? Moi, je te dis la clé de la satisfaction client, c’est les data.

Et tu vas me rétorquer que le digital cela te permet justement cela : avoir des données sur tes clients et que c’est cela l’atout concurrentiel. Mais est-ce bien ça la clé qui ouvre toutes les serrures ? Expérience client et digital, une affaire de culture ? C’est quoi l’histoire ?

Bah tu sais l’histoire plus grande est parfois faite d’histoires plus petites. Alors je vais justement t’en raconter une d’histoire. Enfin, une anecdote personnelle quoi. Histoire de faire de l’exemple particulier une généralisation hâtive…

Ah oui tu veux dire que tu vas encore râler sur une expérience client que tu as faite, c’est ça ? Quand tu as commandé un écran d’ordinateur chez l’américain que certains détestent et fustigent et une machine à laver le linge, chez une entreprise française qu’on aime bien, c’est ça ?

Et oui. La proximité client comme ils disent. Bref, d’un côté je commande la machine à laver sur Internet en choisissant le modèle en fonction du créneau de livraison, le samedi matin 2 jours après entre 8h et 10h, c’est précis, parce que je n’ai pas le temps.

Heureux que tu es, un créneau de livraison précis, pas genre on passera entre 8H et 18h quelque part chez vous entre Strasbourg et Brest. Voilà de quoi construire la confiance et favoriser un bon NPS ! Enfin taux de recommandation net.

Sauf que quelques minutes seulement après avoir payé, je reçois un e-mail me disant que le produit n’est pas en stock… je te passe l’énervement avec le chatbot à l’intelligence plus qu’artificielle et l’opérateur humain qui, in fine, malgré ses répliques toutes faites sorties d’une formation aux outils du service client, te dit en réalité d’aller te faire voir.

Bon en même temps, pénurie de pièces, situation critique partout on peut comprendre la rupture de stocks. A l’impossible nul n’est tenu tu sais !

Tu as raison. Mais tu me le dis avant de me débiter et valider ma commande. Pas après.

Et chez les autres alors, ton écran d’ordinateur ? Ça c’est bien passé ? Tu ne devais pas être livré un lundi avant 17heures ? Tu as bien été livré avant 17 heures à la date prévue ?

Non. Pas livré du tout. Je te passe les détails mais personne ne savait où l’écran était passé chez le livreur. Le site marchand n’en avait aucune idée.

Et j’imagine que le livreur non plus ! Ah les charmes du dernier kilomètre… toujours le plus compliqué comme on dit, surtout quand le produit disparaît des radars. Bon, là encore de quoi alimenter un mauvais NPS non ?

Oui et non. En fait, il ne m’aura fallu que quelques minutes entre le click sur le bouton « vous n’avez pas été livré comme prévu à 17H » et la réception du mail de confirmation de l’ordre de virement sur mon compte bancaire pour le remboursement. A 17H10 j’étais sûr d’être remboursé.

La différence entre les deux est simple à comprendre. Les deux sites ont les mêmes données, sur l’état des stocks en temps réel, etc. Les deux sites ont des processus digitaux bien rôdés. En quelque sorte, ils partent à armes égales.

Sauf que l’un a pensé son processus, l’outil digital qui le matérialise et les données qu’il utilise en fonction de son propre intérêt, là où l’autre l’a fait en étant réellement et concrètement orienté client. Qu’on le veuille ou non, être orienté client c’est un état d’esprit, une culture, pas une affaire de processus. On a les processus qu’on mérite !

En d’autres termes les processus digitaux ne sont que le reflet de notre manière de penser. Et si ta culture fait peu de cas du client, jamais un outil informatique, même le plus moderne qui soit, ne viendra masquer le peu d’intérêt que tu lui portes et combler tes insuffisances.

Rien de nouveau sous le soleil. Ce sujet on en parle depuis tant d’années. Et dans certaines entreprises, rien ne change. Heureusement pas toutes. Et parfois c’est le seul rapport de force qui explique les choses. Et on pourra, dans ces entreprises, afficher toutes les valeurs et toutes les devises du genre « le client c’est notre priorité » cela n’y fera rien.

La culture c’est ce qu’on est en effet, pas ce qu’une phrase sur du papier glacé ou un site web affirme haut et fort. En cela, le digital n’est alors que le reflet de notre état d’esprit.

Sur ce site marchand que beaucoup critique, on peut noter deux choses à son égard. Le fustiger pour des pratiques d’entreprises critiquables oui bien sûr mais le critiquer parce qu’il est objectivement d’une efficience redoutable, c’est juste un aveu de notre propre faiblesse et incapacité à faire aussi bien.

Chacun d’entre nous a une expérience client à raconter, source au mieux d’énervement et au pire d’un sentiment profond qu’on se fout éperdument de sa gueule… parce qu’on peut se le permettre. Jusqu’à ce que cela ne fonctionne plus.

Comme un salarié qui souffrirait d’un sentiment d’injustice et d’un manque de reconnaissance que le peu d’attention qu’on lui prête a fait naître en lui. Ou de ce sentiment d’impuissance dans lequel on le place à force d’injonctions contradictoires… Et là encore ce n’est pas le digital comme levier d’une chouette expérience collaborateur qui viendra régler le problème de fond.

Et le problème de fond c’est bien l’attention qu’on prête à son client ou son collaborateur dont on prétend qu’il est au cœur de je ne sais pas quoi.

Alors avant de s’engouffrer aveuglément dans la digitalisation de ses processus, autant s’assurer qu’on a le socle culturel qui va bien, parce que le digital est un formidable amplificateur, de ce qui est bien comme du pire.

C’est la raison pour laquelle la plupart du temps les grands projets informatiques de type ERP ou grands plans sur la comète du même acabit, sont de formidables révélateurs de nos insuffisances, de nos errances et des merdes qu’on a planquées sous le tapis. Alors quand ça remonte, on tape sur l’outil ou le projet. C’est quand même plus facile que de se remettre en cause.

En résumé, le digital est un levier de l’expérience client mais son impact réel dépend plus de la culture de l’entreprise et de sa capacité à penser des processus en fonction dudit client et non pas de ses seuls intérêts que des outils digitaux en tant que tels.

J’ai bon chef ?

Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire.