DRH, entre stratégie et opérations
Dans cet épisode, nous allons nous demander dans quelle mesure le ou la titulaire du poste de DRH doit s’impliquer dans l’opérationnel auprès de ses équipes.
Dans cet épisode, nous allons nous demander dans quelle mesure le ou la titulaire du poste de DRH doit s’impliquer dans l’opérationnel auprès de ses équipes.
Prends de la hauteur petit scarabée, « rattache ça à un enjeu stratégique » comme dirait l’autre. Maintenant tu es chef, Directeur ou Directrice des RH, ton job c’est de contribuer à la stratégie de l’entreprise
De la hauteur pour ne pas dire de la distance qu’on marque en allant aux réunions de chefs entre chefs pendant que l’usine turbine en dessous pour faire le job. Je me consacre à la noblesse de la fonction, la tête qui pense, et m’affranchit bien de plonger dans les opérations.
Le principe de subsidiarité c’est bien et même à recommander. Un sain principe de gestion. Pour autant, faut-il s’impliquer dans les opérations auprès ou avec ses équipes, lorsque les nécessités de l’activité l’exigent ? DRH, entre stratégie et opérations, c’est quoi l’histoire ?
La question n’est pas si anodine qu’il y paraît. D’abord parce qu’elle peut être posée pour n’importe quel poste de direction voire de management intermédiaire en ce sens qu’elle s’inscrit dans le débat simple « faire ou faire faire ».
Ensuite, elle se pose peut-être de manière particulière pour la fonction RH celle-ci revêtant inévitablement une dimension symbolique et par voie de conséquence une exigence d’exemplarité. Quand on prône un certain modèle de leadership et qu’on met en place des programmes de développement pour les managers, autant en témoigner soi-même…
Commençons par apporter une précision simple pour éclairer le sujet. Il n’y a pas un poste type de DRH tant des facteurs comme la taille de l’entreprise, sa maturité ou son secteur d’activité peuvent influer sur le périmètre de responsabilité du poste.
Et par conséquent la manière de l’exercer. Endosser la responsabilité de DRH dans une petite entreprise expose inévitablement beaucoup plus à la nécessité de mettre la main à la pâte, faute de ressources.
Là où, peut-être, et je dis bien peut-être, les fonctions d’état-major dans des headquarters de grands groupes ont souvent une armée de ressources bien plus fournies et offrent bien des occasions d’être éloigné, et parfois ça en arrange bien quelques-uns, des vicissitudes de ce qu’on a vite fait d’appeler le terrain.
Cette précision posée, on peut en suggérer une deuxième, qui relève de la dimension managériale du poste. Le poste de DRH est un poste de management à qui les principes élémentaires du management s’imposent comme à n’importe quel autre manager.
C’est peut-être ici l’occasion de renvoyer aux fondamentaux du rôle de manager mais surtout de tordre le cou à deux idées reçues qu’on peut entendre ici ou là. La première, même si elle n’éclaire pas particulièrement la question posée en introduction, c’est cette croyance de certains qu’il n’est pas vraiment nécessaire de connaître le métier de celles et ceux qu’on manage au motif que manager serait un métier en soi.
Bah c’est une connerie. Tu n’as pas besoin d’en être un expert certes mais c’est juste une question de pertinence et donc de crédibilité. Tu n’es pas patron d’un restau sans rien connaître aux produits ou aux techniques de cuisson. Même si tu n’es pas expert du Kamado, du four à vapeur ou de la cuisson sous vide, tu en comprends la portée et ce dont il s’agit.
Bref tu n’es pas DRH si tu ne connais pas la RH. OK. Seconde idée reçue sur le management. Ne t’abaisse pas à donner du collier en mettant la main à la pâte. Tu es là pour manager pas pour faire le job de ceux que tu manages. Bref, la tête hors de l’eau laisse les autres pédaler dans la soute.
Seconde connerie. Evidemment que, lorsque c’est nécessaire tu files un coup de main. Il ne s’agit pas, là encore, de faire le job à la place des autres mais d’être présent lorsque nécessaire, quand il y a un coup de feu ponctuel par exemple, ou tout simplement parce que ton expérience est utile ou quand il y a une situation à démêler et que ton statut peut y aider.
Et cela s’applique au poste de DRH aussi bien sûr. Ce dernier a un rôle essentiel qui relève de la contribution stratégique de la fonction. En cela, il agit à la fois sur des temps longs et sur des sujets dont la portée est d’ordre culturel. Une sorte de gardien du temps et du temple.
Mais il assure aussi l’alignement stratégique de la fonction, c’est-à-dire la définition et la mise en œuvre de la politique RH qui « rend possible » la stratégie de l’entreprise.
En cela sa responsabilité ne se limite pas à définir les axes politiques mais aussi à en garantir la mise en œuvre dans des contraintes de ressources et de temps déterminées. Il doit par conséquent définir et mettre en place l’organisation RH, avec les ressources associées, qui le permet.
Une équipe, des responsabilités claires et hop le tour est joué. Le développement des compétences, un climat social harmonieux et fécond, tout ça tout ça ça roule tout seul.
Et bah non, ça ne roule pas tout seul. Déléguer une responsabilité d’une part ce n’est pas s’en débarrasser. On en revient au rôle classique du manager dont le poste de DRH ne peut s’affranchir, notamment dans le suivi des actions en cours, des résultats, les feedbacks et les actions correctrices que cela peut demander.
Et d’autre part, au-delà de cette dimension de management individuel avec celles et ceux qui lui reportent en direct, il faut aussi animer l’équipe RH, la faire vivre, s’assurer de la cohérence transverse des actions, remobiliser etc.
Il ne s’agit pas là de la seule dimension de leadership qui incombe à tout rôle de manager mais bien d’une dimension technique RH. Veiller à ce que les concepts maniés par les uns soient cohérents avec les autres, par exemple la notion de compétences, transverse à la quasi-totalité des pans d’activité RH.
Mais c’est aussi veiller à ce que les choix de court terme de l’un des domaines ne viennent pas insulter le moyen terme ou long terme d’un autre domaine RH et par conséquent introduire des dissonances dans la politique RH dans son ensemble.
Ajoutons peut-être enfin un dernier élément. C’est en faisant qu’on nourrit sa vision, faute de quoi on a vite fait d’être hors sol. Ne serait-ce que pour apprécier si l’on va trop vite ou pas dans les transformations RH elles-mêmes et ce que les équipes RH peuvent supporter comme rythme.
En résumé, exercer un poste de DRH suppose une dimension stratégique mais celle-ci ne se limite pas à la conception d’une politique mais aussi dans sa mise en œuvre ce qui demande de s’impliquer un minimum dans les opérations ne serait-ce qu’à des fins de cohérence et pour ne pas être hors-sol.
J’ai bon chef ?
Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire.