Noyé sous la flotte des voitures de fonction
Dans cet épisode, nous allons parler de la gestion des voitures de fonction et le poids que cela représente.
Moi je veux une voiture rouge qui ronronne comme une panthère, avec une calandre qui fait un grand sourire et des phares qui me font les yeux doux et puis qui va vite comme l’éclair !
Dis-moi Flash McQueen tu n’en demanderais pas un peu trop là ? Et pourquoi pas aussi un cabriolet 4×4 rose à poids vert avec une figurine à l’avant comme sur les Rolls Royce, le fameux « Spirit of ecstasy », qui ferait coin-coin quand on appuie dessus !
La voiture de fonction, matière à jalousie, symbole parmi les symboles pour les uns, objet de tous les fantasmes pour les autres, au point où certains y mettent même toute leur virilité !
C’est con quand tu roules en Twingo, non ? Bref, on le sait c’est un sujet qui laisse rarement indifférent. C’est un pensum à gérer pour les équipes qui en ont la charge. Alors, noyé sous la flotte des voitures de fonction, c’est quoi l’histoire ?
Quelques précisions, en commençant d’abord par un distinguo entre la voiture de service, la voiture de fonction et la voiture de statut.
La voiture de service est affectée à un service. Ce n’est pas un avantage en nature puisqu’elle est mise à disposition d’un service précisément pour le service ! Si Paul a le privilège de la prendre tout le temps pour partir en week-end alors on en discute parce que c’est une autre histoire.
Le terme qu’on a employé, la voiture de fonction, est presque impropre. En toute logique, c’est un outil affecté à une fonction, un poste de commercial par exemple, et dont le titulaire bénéficie parce qu’il occupe le poste et donc en a besoin pour travailler.
Là, l’utilisation dudit véhicule pour une utilisation personnelle est considérée comme un avantage en nature mais on ne va pas entrer dans le détail ici.
Et puis il y a la voiture de statut. C’est ton statut, cadre supérieur ou chef à plumes par exemple, qui fait que tu y as le droit, que ton poste en requiert l’utilisation ou non. L’utilisation à titre personnel y est aussi un avantage.
Va savoir si c’est parce que tu es chef que tu as des plumes ou si ce sont les plumes qui font le chef… Le pouvoir et ses attributs.
En effet, qui dit qu’elle t’es octroyée pour ton statut, dit en parallèle – du moins chez certains – que cela en est un signe extérieur. Et hop on y est, c’est déjà le bazar, parce que tu en as toujours un qui en voudra une plus grosse que l’autre. On connait l’histoire.
Les symboles, les envies des uns et des autres, c’est une longue histoire qui laisse parfois songeur. Mais ce qu’on oublie souvent aussi c’est le coût de gestion de tout ce truc, notamment les emmerdes que cela représente au-delà du coût, et les effets cachés parfois aussi surprenants que désarmants.
Pour faire court, les bagnoles de fonction cela coûte une blinde mais tout ce que cela trimbale et implique aussi ! On se demande encore pourquoi on en a encore !
Certaines entreprises font le choix d’internaliser la gestion complète de la flotte de voitures. Bon c’est rare. D’autres sous-traitent évidemment à un prestataire mais conserve quand même une part de la gestion interne.
Après tout, devant un truc aussi symbolique et source de débat, on peut comprendre la tentation de garder la relation collaborateur sur le sujet, précisément pour être attentif à au service qu’on leur délivre.
Parce que gérer une flotte de voitures, ça ne se limite pas à louer des voitures avec leur entretien auprès d’une entreprise de leasing. C’est aussi déterminer et gérer les règles d’attribution, le cas échéant d’avoir une politique en matière de choix possible de véhicules, notamment dans une perspective d’empreinte carbone…
C’est aussi gérer les gens, leurs demandes, leurs réclamations, leurs mécontentements etc.
Et pourquoi Georges à la compta il a des sièges en cuir et pas moi, pourquoi moi je n’ai pas le choix des options, et chef je peux avoir le GPS, et pourquoi …
Ta gueule. Prends ton char et tire-toi ! Bon ce n’est pas très gentil certes mais j’imagine que cela doit brûler les lèvres de certains gestionnaires car s’il est un domaine où l’on risque de ne faire que des mécontents, c’est bien celui-là.
On a parfois l’impression que c’est épidermique comme sujet. Sans parler des attributions en cours de route. Le directeur Machin à qui l’on passe une voiture en stock car elle n’a pas atteint la fameuse limite 3 ans ou 100000 kms et était attribuée à un salarié qui vient de démissionner, mais évidemment ce n’est pas celle qu’il veut.
Faut dire que monsieur Machin lui ce qu’il aime dans l’espace c’est l’espace et d’être haut sur pattes. Tu comprends il aime bien dominer. Alors un break plus haut de gamme mais rase-motte il n’aime pas.
Comme madame Trucmuche qui prend un modèle moins coûteux que ce à quoi elle a le droit mais qui n’a toujours pas compris que cela ne justifie pas qu’on lui change plus souvent.
Et la tête de celles et ceux qui en ont une pour la première fois et qui découvrent qu’on leur réintègre l’avantage en nature sur leur feuille de paie, ils n’y avaient pas pensé…
Un nid à emmerdes on a dit. Alors pourquoi conserver cette gestion en interne. Pourquoi ne pas dire à chacun tu as un billet de 500 par mois, tu choisis ce que tu veux chez qui tu veux et tu envoies la facture mais on ne s’occupe de rien ?
D’abord parce que certaines entreprises veulent orienter leur politique en la matière. Pour des raisons d’empreinte carbone par exemple.
Ou aussi pour des raisons d’image, on l’a dit la voiture a une dimension symbolique. Même si c’est con, c’est une réalité.
Je me souviens de ce membre du comité de direction qui m’avait fait une remarque sur mon choix d’un cabriolet, même si c’était en-dessous du budget qu’on m’avait alloué, ça ne faisait pas sérieux. Tu comprends, un directeur ça roule forcément en berline allemande 4 portes et diesel…
On n’est pas sortie des ronces en effet. Allez, vive les vélos de fonction !
Et pourquoi moi je n’ai pas de panier pour mettre mes courses ? Et moi je veux des pinces à vélo en plus, et pourquoi mon vélo il n’a que deux plateaux, celui de Nicolas il en a 3…
Allez, la ferme, rentre chez toi à pied !
En résumé, la gestion interne d’une flotte de voitures de fonction est une source inépuisable de tracasseries dont le coût et les conséquences sont tout sauf négligeables. On pourrait être alors tenté de donner un montant et laisser chacun libre de ses choix mais cela n’exonère malheureusement pas de tout ce que les gens mettent dans leur voiture !
J’ai bon chef ?
Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire.