Ce que c’est ou à quoi ça sert ?
Dans cet épisode, nous allons parler d’un défaut fréquent chez les experts ou les praticiens d’un métier, ne pas être assez tourné client.
Alors, pour les bougies, tu as les bougies conventionnelles, les bougies à électrode en platine, les bougies coulées, les bougies de paraffine en coque métallique, celles de 12 par 2, celles de 20 par 3
Hop hop hop le spécialiste de la bougie là… Calme-toi, tu ne peux pas me dire simplement qu’il y a les bougies d’allumage et les bougies d’éclairage ? Celles qui permettent au moteur de démarrer et celles qui permettent de faire une jolie lumière chez moi ?
Oui mais je t’assure ce ne sont pas les mêmes. Tiens regarde les bougies de paraffine en coque métallique n’ont rien à voir avec la bougie en paraffine de 12 par 2…
Oui je sais. Une bougie chauffe-plat et un cierge ça ne sert pas à la même chose. Tu manges ou tu pries. Et justement, c’est là toute la différence. Alors, ce que c’est ou à quoi ça sert, c’est quoi l’histoire ?
Celui qui exerce un métier a naturellement, du moins peut-on l’espérer, envie de bien l’exercer. Cela demande des compétences techniques liées à son métier et notamment la connaissance qui va avec.
Le bricoleur, quand il range ses outils dans son atelier, il aime bien avoir un panneau où il a accroché les tournevis sur une rangée, bien alignés par taille pour trouver plus vite le bon, avec les plats d’un côté et les cruciformes de l’autre…
Et sur une autre rangée, il aura accroché les clés de 10, de 12 et de 14 comme des poupées russes. Après tout, quoi de plus normal, puisqu’il a besoin de les retrouver vite.
Son réflexe, face à un sujet qui relève de son métier, est de classer les choses en fonction de leurs caractéristiques techniques, pas de leur usage. Parce que l’usage il le connaît. Il sait quelle caractéristique technique correspond à chaque usage.
C’est ainsi que le professionnel des RH t’expliquera que dans les compétences, il y a les compétences techniques, les compétences métiers, les compétences transverses, les compétences clés, les compétences critiques, les compétences stratégiques, les hard skills, les soft skills, les mad skills, les savoir, les savoir-faire, les savoir-être…
Stoooooop ! Car il a perdu ses interlocuteurs dès le début… Bien sûr, sur le fond, on peut faire ce type de distinguo, sans aucun doute. Mais es-tu bien sûr que c’est ce qui parle à ceux à qui tu t’adresses… Les managers par exemple.
Tiens prends l’exemple de la rémunération globale et ses différentes composantes. La littérature académique et beaucoup de praticiens, la décompose en fonction des caractéristiques techniques intrinsèques de chacun des composants.
On fait alors souvent référence à la pyramide de Donnadieu avec la rémunération directe, les périphériques légaux, les périphériques sélectifs et les périphériques statutaires…
Quand on en parle entre experts ou praticiens RH, on comprend. Mais à destination d’un public profane, qu’est-ce qui l’intéresse lui ? Évidemment, ce à quoi cela lui sert, ou ce qu’il en tire.
Par exemple, consommer, épargner ou se protéger en cas de perte de revenus. Bref, une manière de présenter le sujet, qui s’inscrit dans sa perspective à lui et non pas dans la perspective technique chère à l’expert.
Classer, catégoriser c’est bien mais encore faut-il le faire pour que cela serve à quelque chose. On peut avoir besoin d’une classification qui repose sur des critères techniques. Une classification des emplois-repères par exemple. Parce que la finalité poursuivie est d’ordre technique.
Mais lorsque la finalité poursuivie est de s’adresser à des profanes, le but n’est pas qu’ils connaissent les spécificités techniques de telle ou telle case mais qu’ils en comprennent ce que cela signifie, notamment pour eux.
Peut-être peut-on voir dans ce défaut que peuvent parfois avoir les experts, bien que cela ne soit pas systématique, loin de là et heureusement, la volonté implicite de préserver leur pré-carré en ne laissant pas y entrer le profane.
En cela, l’utilisation d’un langage technique et d’une approche technique aide à tenir ce dernier à l’écart… Mais si l’on veut être compris, peut-être alors faut-il faire un effort à leur intention.
Alors lorsqu’il s’agira de parler de compétences à un manager, l’essentiel que le praticien RH devra comprendre c’est qu’il s’agit de faire en sorte que ce manager comprenne intimement l’importance de développer celles de ses collaborateurs.
Pas la subtilité du jargonnage RH. Ou alors, il faudra lui expliquer pourquoi et pour quoi on fait un focus particulier sur tel ou tel type de compétences pour qu’il en saisisse le sens.
Adopter ce type de posture, soucieuse de celles et ceux à qui on s’adresse, cela va plus loin que le simple fait d’être compris. Lorsque tu prends l’avion, le personnel au sol et le personnel navigant technique…
Cela peut être utile à la classification des postes et tout ce que tu veux. Mais quand tu es dans l’avion, le PNC aux portes, armement des toboggans, etc. OK ils se comprennent entre eux.
Mais PNC Personnel Navigant Commercial, cela ne m’envoie pas le même message que Stewards ou Hôtesses. Parce que ce que j’attends c’est un service.
Je me souviens de l’accueil d’un pilote pour un vol intérieur sur un petit avion avec à peine plus de 40 places. Il nous avait présenté l’équipage par leurs prénoms. On se sentait accueilli.
En résumé, adopter une typologie fondée sur des critères techniques intrinsèques à ce que l’on classe c’est utile lorsqu’on poursuit une finalité technique ou qu’on échange entre experts mais si l’on s’adresse à des profanes, mieux vaut adopter une typologie fondée sur l’usage ou le bénéfice pour eux.
J’ai bon chef ?
Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire.