Un RACI ? Mais pour quoi faire ?
Dans cet épisode, nous allons revenir sur un basique de la gestion de projet : le RACI.
Dans cet épisode, nous allons revenir sur un basique de la gestion de projet : le RACI.
Un basique de la gestion de projet en effet, tellement basique que c’en est ridicule. En gros un RACI ça revient simplement à se poser la question « qui fait quoi », pas besoin d’avoir fait une grande école ou de se payer des consultants pour ça, encore moins d’en faire un podcast hein.
Tu as raison, surtout qu’en entreprise, c’est toujours très clair ce fameux qui fait quoi. Pas besoin d’un outil pour cela. On lance le projet et hop les gens suivent. Faut compter sur l’intelligence collective.
Elle a bon dos cette fameuse intelligence collective, mais c’est un autre sujet. Revenons à nos moutons en l’occurrence notre RACI et demandons-nous s’il est utile. Alors un RACI, pour quoi faire ? C’est quoi l’histoire ?
Avant de se demander à quoi ça sert, essayons d’expliquer ce que c’est et quelle forme ça prend. Déjà, RACI c’est un acronyme : Responsible Accountable Contributor Informed.
Ah bah voilà, encore un truc de consultant qui préfère parler anglais parce que c’est plus cool et qui formalise tout en « livrable » pour faire croire que ça bosse. Tu vas voir que, in fine, c’est juste un tableau ce truc !
En effet, ça prend souvent la forme d’un tableau à 2 entrées. En ligne on a les différents rôles du projet : chef de projet, directeur, sponsor ou encore service machin chose, équipe truc muche… et en colonne les 4 lettres RACI et on coche les cases. Et donc on a un tableau pour chaque activité du projet.
Ou alors, et personnellement je préfère faire comme cela, en ligne les activités à mener dans le cadre du projet, en colonne les 4 lettres RACI et dans la case à la jonction des deux le nom des personnes ou des équipes qui correspond.
Alors reprenons ces fameuses 4 lettres, dans l’ordre. D’abord R pour « responsible » donc responsable comme on peut s’en douter. C’est celui qui est en charge de mener à bien l’action ou l’activité dont on parle. C’est lui qui va coordonner les différentes contributions et c’est vers lui qu’on se retourne pour savoir où ça en est, si c’est en retard ou pas au niveau attendu.
A pour « accountable » c’est celui qui valide le résultat final, il a délégué à R l’activité mais il en reste le garde-fou. Il vérifie donc l’avancement et le niveau de qualité et il met son coup de tampon.
C pour contributor, donc contributeurs. C’est ceux (il peut y en avoir plusieurs) qui… contribuent ! Incroyable non ? Ils ne sont pas responsables de la coordination, mais ils apportent leurs compétences, souvent leur expertise, et pour faire classe on peut dire « leurs inputs » pour permettre au responsable de mener à bien l’activité.
Et enfin I pour « informed ». Pas besoin d’un dessin, c’est ceux qu’on doit informer. Ils ne prennent pas part au projet mais ils sont intéressés par la décision prise, souvent parce qu’ensuite ça déclenche des actions de leur côté.
Par exemple, l’assistant du service ne participe pas au process de recrutement d’un collaborateur mais doit être informé quand la décision est prise pour faire son badge et préparer son arrivée.
Ce I parait anodin mais c’est une question essentielle. Identifier dès le démarrage qui on doit informer permet d’éviter les trous dans la raquette ! et permet aussi de se demander si on doit effectivement juste « les informer » ou si on a besoin de leur contribution et si oui laquelle, on y reviendra.
Heureusement qu’il existe un outil, ou plutôt un tableau pour ça ! Si non jamais on y serait arrivé !
Je te sens moqueur ! Et tu as raison, si on s’arrête juste au tableau… il n’y pas grand intérêt. L’intérêt c’est plutôt de voir les discussions que soulève le fait de remplir ce fameux tableau. In fine, le RACI est une simple formalisation de questions beaucoup plus complexes.
Ces 4 attributions responsable, valideur, contributeur et informé permettent en fait de se poser les bonnes questions. A condition d’être un peu rigoureux quand on y répond.
Pour chaque action à mener ces 4 questions sont à se poser : Qui est en charge de mener l’action ? De la valider ? Qui peut-on solliciter et qui doit être informé de la décision ?
Un exemple de rigueur à adopter lorsqu’on répond : il peut y avoir plusieurs C et I mais il ne peut en revanche y avoir qu’un seul R et qu’un seul A. Facile à dire… moins facile à faire.
Et ces questions on ne se les pose pas uniquement au début du projet, ce n’est pas parce que c’est formalisé que hop c’est rangé dans un dossier et on ne l’ouvre plus. Un RACI ça se fait au début pour poser le cadre mais ça vit aussi au fur et à mesure du projet.
D’ailleurs on parle beaucoup de projet, car c’est souvent dans ce cadre-là que l’on fait un RACI. Mais un RACI est utile dès que l’on travaille à plusieurs. Au sein d’une même équipe ou avec des équipes de services différents.
Quand il s’agit de mettre en place un nouveau process, par exemple, on se pose ces 4 mêmes questions : qui est responsable de quoi …
Qui valide, contribue et doit être informé oui c’est bon je crois qu’on a compris.
Finalement ce RACI c’est en effet un outil un peu con-con : 4 lettres pour nous permettre de n’oublier aucun rôle et un formalisme un peu scolaire pour s’assurer qu’on respecte une règle d’or : un seul R et un seul A, bien qu’il puisse y avoir plusieurs C et plusieurs I !
On l’a déjà dit ça chef ! Mais tu as raison c’est clé. Au fond, l’enjeu ce n’est pas l’outil, mais bien la rigueur qui va avec, notamment pour répondre aux 4 questions.
Et la réponse n’est pas si facile. Quiconque a déjà pris en charge la responsabilité de formaliser un RACI s’est heurté à plusieurs difficultés. Parce que derrière ce tableau d’apparence simple, plusieurs enjeux sont cachés. Ne pas répondre permettait de mettre la poussière sous le tapis mais pas de la faire disparaitre.
Alors justement, soulevons le tapis. Nous retrouvons d’abord la question des marges de manœuvre. Entre le responsable de l’action et celui qui la valide : qui fait quoi exactement et quelle décision peut prendre le responsable sans s’en référer au valideur. Si la réponse est « aucune » : alors supprimons le R. C’est le valideur qui endosse aussi la casquette du responsable.
La même question des marges de manœuvre se pose entre les contributeurs du projet et leur propre manager qui ne fait pas forcément partie du projet mais qui va vouloir venir mettre son nez. A quel point doit-il se référer à son management avant de soumettre une proposition au responsable ?
Bienvenue dans les organisations matricielles ! En fait l’enjeu principal est celui de la délégation. Comme en management classique, le management de projet suppose de poser un cadre de délégation clair ! C’est bien cela que révèle le RACI : délégation, autonomie, contrôle, confiance… Des sujets qui peuvent déranger dans certaines cultures d’entreprise.
Et souvent dans ces cas-là, quand le RACI dérange, soit on formalise des RACI d’apparence pour être compliant. Soit on lève les yeux au ciel en maugréant que cet excès de formalisme ne sert à rien. Et on préfère le flou qui n’a rien d’artistique au lieu de traiter réellement le sujet, souvent source de mal-être voir de RPS mais c’est un autre sujet.
Sans compter les jeux de pouvoir, qui se trouvent eux aussi sous le tapis. Le service machin qui a demandé de manière tout à fait innocente d’être juste « informé » et qui vous met des bâtons dans les roues une fois la décision prise, parce qu’ils aimeraient quand même bien influer sur la décision.
Le RACI au fond c’est juste une formalisation, rien de plus. Mais le fait d’avoir formalisé au début peut faire gagner du temps ensuite parce qu’on a levé de nombreuses interrogations, on a accordé nos violons avant de jouer la partition. Ça évite de s’arrêter au milieu de la répétition ou pire du concert !
En résumé, un RACI c’est simplement la formalisation de 4 questions que l’on devrait se poser pour tout projet, ou processus, ou travail en collectif : qui est responsable de quoi, qui valide, qui contribue et qui doit être informé. Ces questions se posent au début pour cadrer mais également tout au long de l’avancée et soulèvent des enjeux plus profonds comme la délégation ou les jeux de pouvoir.
J’ai bon chef ?