Quand Brassens chante le manager
Dans cet épisode, nous invitons Georges Brassens nous chanter le manager
« Au village sans prétention, j’ai mauvaise réputation, que j’me démène ou qu’je reste coi, je passe pour un je ne sais quoi. Je fais pourtant de tort à personne, en suivant mon chemin de petit bonhomme » disait Brassens. Mais voilà, moi je suis manager et c’est bien là… mon erreur.
« Pas besoin d’être Jérémy pour deviner le sort qui m’est promis, s’ils trouvent une corde à leur goût, ils me la passeront au cou » disait Brassens. Mais fustiger le manager, le pointer du doigt comme l’on crie gare au gorille, est-ce vraiment ça qui nous permettra de « naviguer peinard sur la grand’ mer des canards » ?
Alors convoquons le pornographe du phonographe, le polisson de la chanson pour nous chanter les louanges, ou pas, du manager. Quand Brassens chante le manager, c’est quoi l’histoire ?
« Il y a des clients, il y a des salauds qui ne se trempent jamais dans l’eau » et il y a des managers aussi qui sont des « vaches de bourgeois » aussi peu plaisants que le gérant du bistrot, tu sais: « dans un coin pourri du pauv’ paris sur une place, l’est un vieux bistrot tenu par un gros dégueulasse ».
Ces chefs à plumes, crades et grossiers qui se tapent du coude quand la secrétaire passe devant leur nez… hey, « quand je pense à Fernande, je… »
Oui on a compris. Faut bien avouer qu’ils « ne brille(nt) ni par le goût ni par l’esprit ». Et pourtant ces managers, que l’on appelle aujourd’hui toxiques, font parfois la loi.
Même pour moi qui « n’avais jamais ôté mon chapeau devant personne, maintenant je rampe et je fais le beau quand elle me sonne ». Parce que ces managers-là ont du pouvoir, du haut de ce qu’on appelle la hiérarchie et qui fait qu’en bas, on se plie en deux pour « que le coq imbécile et prétentieux perché dessus, ne soit pas déçu ».
« Ces imbéciles heureux qui sont nés quelque part »… « les voilà qui se montent le cou jusqu’à penser que le crottin fait par leurs chevaux, même en bois, rend jaloux tout le monde » disait Brassens.
« Ces petits cons de la dernière averse, ces vieux cons des neiges d’antan » n’avaient peut-être pas « l’esprit plus grand qu’un dé à coudre » mais pour gravir les échelons, parfois, on ne demande pas d’avoir inventé la poudre.
Il peut alors « dormir ce souverain sur ses deux oreilles, serein, il y a peu de chances qu’on détrône le roi des cons ». Et on le sait « quand on est con… on est con ».
C’est bien regrettable, car « une jolie fleur dans une peau de vache, une jolie vache déguisée en fleur qui fait la belle et qui vous attache puis qui vous mène par le bout du coeur ». On se retrouve avec dans nos rangs, des caporaux pas très élégants.
Diable qu’un peu de mauvaise herbe entache toute l’image d’un pourtant si beau métier. Braves gens « c’est immoral et c’est comme ça » comme disait le copain Georges.
Bah non, ce n’est pas comme ça. « Oui, je suis tatillon, pointilleux » disait-il aussi. Et j’estime que le manager doit être gentleman complet, pas superman. Exemplaire du mieux qui peut, juste et honnête. En un mot, responsable.
Il est alors de la nôtre de responsabilité, autre manager, directeur, directrice, RH, de veiller à ce que la cage du puissant gorille reste fermée et qu’on ne puisse pas dire « je suppose qu’on dut la fermer mal ».
Alors « certes, il m’arrive bien, revers de la médaille, de laisser quelque fois des plumes à la bataille » en défendant haut et fort que manager, est un beau métier. Mais je reste convaincu, qu’il y a des managers comme ces amoureux sur les bancs publics « se foutant pas mal du regard oblique des passants honnêtes », il y a ces managers-là qui font bien leur boulot.
Ce manager qui « toujours il était content, menant les gars du village à travers la pluie noire des champs ». Car « le petit cheval dans le mauvais temps, qu’il avait donc du courage », « Tous derrière, tous derrière et lui devant »
Et du courage il en faut. Parce qu’il faut bien l’avouer, parfois le manager c’est celui qu’on envoie au front et qui risque de revenir les pieds devant. Partez donc devant, on vous suit. Ou pas.
Oui parfois, certains s’évanouissent devant la tâche ou l’injustice, et tant pis et sauv’ qui peut, car « chères images aperçues, espérances d’un jour déçues, Vous serez dans l’oubli demain Pour peu que le bonheur survienne Il est rare qu’on se souvienne Des épisodes du chemin »
Alors souvenons-nous et ne nous perdons pas dans des guerres inutiles, car à toutes guerres vaines, Brassens déclara toujours que « mon colon, celle que j’préfère c’est la guerre de quatorze dix-huit ».
Car « s’il suffisait, de quelques hécatombes pour qu’enfin tout changeât, qu’enfin tout s’arrangeât, depuis tant de grands soirs que tant de têtes tombent au paradis sur terre on y serait déjà »
Alors, concentrons-nous et sonnons la trompette de la renommée de ces managers qui… savent manager. Bien sûr, « c’était pas des anges non plus, l’évangile ils ne l’avaient pas lu ». Mais il y en a plein, qui, le moment venu, se retroussent les manches, parfois remontent les bretelles mais toujours travaillent de concerts avec leurs équipes.
A qui ils « proposent un coin de parapluie contre un coin de paradis » comme chantait Brassens.
Et les coéquipiers chantent alors en chœur et avec cœur « des bateaux j’en ai pris beaucoup mais le seul qui ait tenu le coup, qui n’ai jamais viré de bord, naviguait peinard sur la grand’ mer des canards et s’appelait les copains d’abord. »
Les capitaines à bord, ce sont ces managers qui savent créer un climat de confiance. « On est n’importe qui, on vient n’importe quand et comme par miracle par enchantement on fait partie de la famille. Dans son cœur en se poussant un peu reste encore une petite place, chez Jeanne, la Jeanne. »
Et Brassens de reprendre « Dieu fasse que ma complainte aille tambour battant lui parler de la pluie lui parler du gros temps » et replacer le manager là où il doit être. Un être humain comme les autres, fait de vices et de vertus, et soulignons donc celles-là, car elles peignent un monde plus beau à contempler.
En résumé, il est à toi ce podcast, toi le manager, qui sans façon m’as donné envie de m’engager, quand les autres me tiraient dans les pieds. Toi le manager, qui m’a tendu la main quand les croquantes et les croquants, tous ces gens bien intentionnés s’amusaient à me regarder couler. Ce n’était rien qu’un petit soutien mais il m’avait chauffé le corps et dans mon âme il brule encore, à la manière d’un feu de joie.
J’ai bon chef ?
Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire.