PowerPoint rend-il vraiment con ?

Dans cet épisode nous allons parler de PowerPoint et nous demander s’il rend vraiment si con que cela …

Dans cet épisode nous allons parler de PowerPoint et nous demander s’il rend vraiment si con que cela …

Hey, on s’en fout non de PowerPoint ? Enfin au moins autant que de Canva, de Prezi, de Keynote ou de tout ce que tu veux comme outil de présentation. D’ailleurs pourquoi un outil, quel qu’il soit, rendrait-il con ?

Oui, en effet, surtout si on l’est déjà hein ! Il faut avouer que certains, et certaines aussi, commencent avec des avantages compétitifs indiscutables en la matière, PowerPoint ou pas…

Alors on ne devrait pas se poser la question ! Sauf que, manifestement, le sujet en a interrogé plus d’un depuis que le très respecté général américain James Mattis a jeté le pavé dans la mare en affirmant je cite « in english in the text » : « Powerpoint makes us stupid ! »

Une question de la plus haute importance, à un point tel d’ailleurs, que certains en ont même fait un livre. C’est le cas de Franck Frommer avec son ouvrage sur « la pensée PowerPoint »… c’est dire ! Alors PowerPoint rend-il vraiment con ? C’est quoi l’histoire ?

Une histoire de connerie donc une histoire inépuisable… Le sujet paraît futile, c’est vrai. A quoi bon se poser la question ? Mais en vérité elle n’est pas si anodine que cela. Ce qui est frappant dans cette histoire c’est que l’outil dont il est question ici cristallise certains énervements…

Oui, je connais par exemple un DRH qui m’avouait en avoir marre des consultants à 3000 balles la journée pour faire des Powerpoints desquels ils avaient oublié de changer le nom du client…

C’est vrai que 3000 la journée pour ne même pas savoir faire correctement « édition, rechercher remplacer »… CTRL-F… faut pas pousser ! Bref, vu comme ça, cela peut en crisper plus d’un, à juste titre en effet.

Quand tu prends les supports de présentation de certains cabinets d’ailleurs, honnêtement après avoir vu quelques slides tu peux rapidement dire qui c’est… Les mêmes templates, les mêmes approches mainstreams, les mêmes taglines, les mêmes wording…

Oui mais alors qu’est-ce que Powerpoint vient faire ici ? Que l’on s’énerve contre les « PowerPoint rangers », les consultants stéréotypés ou les réunions de codir à n’en plus finir avec des supports aussi soporifiques que possible… PowerPoint cristallise les critiques !

So, What’s the Point with PowerPoint ? Faisons donc le point sur Power… Point, en on commençant par un coup de poing, avec un G et pas un T : ce n’est pas Powerpoint qui rend con. C’est nous qui sommes cons !

On comprend aisément la critique qu’on peut faire à l’outil. Deux sautent aux yeux. La première ce sont les puces d’énumération, bref, les « bullet points ». Cela met un peu tous les arguments au même niveau d’importance !

En résumé, ils incitent inconsciemment à passer d’une démarche où l’on passe d’un argument à un autre à l’aide de la logique pour former une démonstration à une liste d’affirmations, chacune d’entre elles prenant visuellement le même poids que les autres.

Rien de bien nouveau dans tout ça non ? Le journal télévisé nous fait la même chose quand on te traite dans le même temps les uns après les autres la rubrique des chiens écrasés avec la guerre ou le climat ! On crée la même chose insidieusement dans l’esprit du public.

Oui une sorte de nivellement de l’importance des choses… chacune d’entre elles prenant une proportion similaire, ce qui est évidemment très dévastateur quant à l’esprit critique qu’il faudrait.

Donc premier point, avec un T pas un G cette fois-ci, le bullet point comme symbole de vérités qu’on assène les unes après les autres.

La seconde critique qui saute aux yeux c’est l’uniformisation de la pensée que cela provoque. Des templates simples et faciles à utiliser, l’outil se démocratise et hop tout le monde présente le fruit de sa réflexion de la même manière…

Bref, in fine, un effet induit donc qu’on peut résumer de la manière suivante : bullet point et templates de présentation favorisent une uniformisation de la présentation d’une pensée qui affirme ses vérités plus qu’elle ne démontre grâce à un raisonnement logique.

Et c’est alors que paf, Prezi débarque pour enchaîner de façon plus fluide d’un point de vue visuel, incarnant alors à merveille – et surtout à point nommé – le pouvoir narratif d’un storytelling rompant avec cette pensée pré-formatée.

Alors, on joue dès lors d’un autre ressort. L’histoire qui se raconte en conviant l’émotion d’un public que les bullet points avaient perdu ! Ce n’est pas par hasard d’ailleurs que devant l’engouement pour Prezi Powerpoint a introduit une nouvelle transition entre slides nommée « morphose » qui donne facilement l’illusion du même effet visuel.

Bref, l’outil toujours l’outil ! On le rend responsable de ce que nous sommes. Un peu comme si le stylo était la cause de la poésie. Bien sûr, tout outil, par les caractéristiques qui sont les siennes, ouvre un champ des possibles et conditionne un peu nos comportements et façons de faire.

« L’homme pense parce qu’il a une main » disait le philosophe ancien. Alors oui l’outil joue un rôle. Mais ne le rendons pas responsable de tout. Prenons un exemple bête. Si je te donne un marteau, il n’est pas impossible que tu tapes sur la vis plutôt que de chercher un tournevis. Si je t’avais donné une scie, tu aurais certainement réclamé le tournevis.

Mais ce n’est pas le marteau qui est en cause ou sa prétendue influence. C’est ta paresse ! Bref, c’est pareil avec PowerPoint comme avec Prezi ou autre.

Prends une keynote de feu Steve Jobs, bon tu me diras, il ne devait pas utiliser Powerpoint mais keynote le bien nommé. Mais c’est globalement pareil. Le pouvoir narratif et de conviction de ses keynotes est évident. Je doute qu’il se contentait d’utiliser un template avec des bullet points !

Non, un mot-clé en blanc sur fond noir, une image évocatrice et la force du discours et de la présence.

Avec PowerPoint, Keynote, Prezi, Google Slides, Canva, Zoho Show, ce que tu veux, on peut, si on le veut et donc si on accepte d’en faire l’effort, ne pas tomber dans les écueils qu’on a cité. Au contraire, on peut les mettre au service d’une pensée construite et transmise avec intelligence.

Le problème c’est donc nous. Notre connerie, notre paresse, bref ce que tu veux de nos défauts mais pas PowerPoint en tant que tel. Il en va de même pour de nombreux sujets où la méthode ou l’outil cristallise nos critiques comme on tuerait le messager.

Alors, en l’occurrence les consultants PowerPoint dont on parlait tout à l’heure, le problème de fond, ce n’est pas PowerPoint mais bien le respect de leur client et la valeur ajoutée qu’ils apportent vraiment.

En résumé, PowerPoint, en tant qu’outil largement diffusé a peut-être comme tout outil des conséquences insidieuses, mais s’il cristallise autant de critiques c’est surtout parce qu’il révèle les insuffisances de celles et ceux qui l’utilise.

J’ai bon chef ?

Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire