La question des indicateurs et des KPI en RH
Dans cet épisode, nous allons vous parler des indicateurs et des KPI pour la fonction RH
Dans cet épisode, nous allons vous parler des indicateurs et des KPI pour la fonction RH
Depuis les années 60 et les premiers travaux sur le capital humain [1], la question des indicateurs pour les RH est une sorte de serpent de mer auquel on ose finalement peu s’attaquer. Certains voudraient en mettre partout, parce que mesurer ça rassure, parce qu’il faut compter pour légitimer, par ce qu’il faut du concret, et les chiffres ça c’est concret. Et d’autres au contraire s’y refusent, ne souhaitant en aucun cas réduire l’humain à une collection d’indicateurs.
Ou tout simplement parce qu’ils·elles estiment, peut-être à juste titre, que tout ne se mesure pas ! En toute hypothèse, ce n’est pas facile en effet de définir des indicateurs pertinents. Si on prend le seul sujet de la qualité de vie au travail par exemple, on utilise souvent le taux d’absentéisme comme indicateur. Mais pour autant, comment on fait pour mesurer les facteurs profonds de la souffrance au travail qui viennent de la destruction de sens, des injonctions contradictoires, de la réduction de l’autonomie… alors que ce sont des facteurs essentiels de la QVT.
Alors quels indicateurs utiliser pour la fonction RH ? Comment les définir ? Est-ce qu’il y a des erreurs à éviter ? Allez, on vous donne quelques indications et contre-indications sur les indicateurs dans cet épisode. Les indicateurs en RH, c’est quoi l’histoire ?
Il y a un premier niveau d’indicateurs en RH, assez classiques, qui sont simples à mettre en place : on y retrouve souvent par exemple le turn-over, l’absentéisme et le suivi de la masse salariale. Mais il ne s’agit pas à proprement parler d’indicateurs de performance. Un réel raisonnement sur la performance est à engager si on veut déterminer des indicateurs pertinents.
Et c’est là le bon sujet in fine. Il y a un choix à faire entre deux postures : devenir un contrôleur des poids et mesures en se focalisant sur les indicateurs ou s’en servir pour apprécier les progrès réalisés et engager une réflexion sur la performance.
Même sur les sujets complexes, les indicateurs peuvent permettre une approche mais il faut garder à l’esprit que le thermomètre indique seulement votre température, il ne vous dit pas de quelle maladie vous souffrez.
Si on comprend que la mesure est là pour inviter à réfléchir en vue d’une amélioration, alors on est sur la bonne voie. Cette réflexion doit être articulée avec une réelle connaissance du terrain et des enjeux business. Elle sera d’autant plus aboutie qu’elle portera sur les liens entre les indicateurs, c’est-à-dire sur la nature de la performance.
Quand il s’agit de déterminer les indicateurs à suivre, il y a de nombreuses erreurs à éviter. En voici quelques-unes. Tout d’abord « tout et trop » mesurer, ce qui fera négliger le reste du travail ou construire une usine à gaz avec trop d’objectifs, qui risque de perdre tout le monde.
Et les indicateurs doivent aussi éviter d’être trop auto-centrés sur la RH, il faut qu’ils soient en lien avec les objectifs de l’entreprise. Il faut éviter « l’effet de halo », c’est-à-dire les indicateurs qui sont trop centrés sur le point de vue d’une partie prenante sur un axe d’analyse. Cela va donner une vision déformée de la réalité, souvent liée à un biais culturel ou des intérêts personnels.
Et enfin, la dernière erreur que nous voulions mentionner on peut l’illustrer par un parallèle avec la confusion qu’on fait souvent entre le prix et valeur. Parfois c’est justement ce qui a de la valeur qui n’a pas de prix ! L’amour ou la liberté par exemple. Un indicateur ne doit pas devenir une vérité, il faut aussi tenir compte de ce qui ne se mesure pas.
Mais alors comment fait-on ? Comment éviter ces erreurs et comment définir des indicateurs pertinents ?
Tout d’abord il faut s’interroger sur ce que l’on cherche à comprendre et pas seulement identifier un indicateur pour mesurer un résultat. C’est ce qu’on disait au début : mener une réelle réflexion sur la performance. Là c’est la même chose : que cherche-t-on à suivre, à piloter, à comprendre, à faire évoluer ? Et ensuite, décliner les indicateurs associés.
Pour éviter une déconnexion du réel, il est important d’impliquer toutes les parties prenantes dans la définition de ces indicateurs. Le débat contradictoire permettra d’éviter les biais de représentation et de voir en quoi ils ne correspondent pas au réel. Faire challenger les indicateurs par le terrain est une bonne manière de voir s’ils ont du sens pour ceux qui sont à pied d’œuvre et ça permet dans le même temps de faire la pédagogie de ces indicateurs, pourquoi on les suit, et comment leurs efforts individuels et collectifs, contribuent à la réussite du projet.
Et enfin, sans oublier un aller-retour permanent entre ce qu’on aimerait faire et ce dont on dispose. De temps en temps, il faut savoir sacrifier une partie du purisme de l’objectif à atteindre. Si, avec les indicateurs disponibles, 80 % du problème est couvert, il n’est forcément utile d’aller plus loin. En parallèle, il faut toujours estimer la faisabilité et le coût des dispositifs.
En résumé, les indicateurs en RH ne doivent pas conduire à des politiques conformistes soumises à l’hypnose du chiffre. Pour cela, plusieurs erreurs sont à éviter et notamment 1) de s’interroger sur ce que l’on cherche à comprendre, 2) de mener une réflexion collective, challengée par le terrain et enfin 3) de faire un aller-retour permanent entre ce qu’on aimerait faire et ce dont on dispose réellement.
J’ai bon chef ?
Oui tu as bon mais on ne va pas en faire toute une histoire
[1] Voir les travaux de Theodor Schultz et Gary Becker, école de Chicago